lundi 13 juillet 2020

D'un côté ou de l'autre ( extrait)








Il y avait dans la désespérance de Léa comme l’écoulement d’une rivière dans la douceur du soir, un mince filet d’eau qui gémit au fond du lit quand les yeux sont secs et qu’il ne reste que des cailloux pour retenir le flot des pleurs. Elle se sentait glacée comme si elle avait été au bord d’un gouffre, paralysée, ne sachant si elle devait sauter. Elle sortit sur la terrasse et s’assit un moment dans son fauteuil, le regard une fois de plus complètement perdu songeant à sa vie de rien qui ne l’avait amenée au bord de l’océan que pour y déverser le bout de ses chagrins.   

Qu’avait-elle à attendre de cette vie qui épongeait sans cesse un front livide. Au regard de sa solitude, le crépuscule qui descendait le long de l’horizon comme le feu d’une passion négligée par l’autre, aurait pu la retenir…tout lui était étranger. Le village avait perdu de son charme et ne ressemblait ce soir dans la pénombre qu’à un ballet de fantômes grand-guignolesques. Demain le jour se lèverait sur l’ineffable déploiement de l’aube et elle aurait oublié ce moment d’incertitude se plongeant avec courage dans une journée d’occupations qu’elle qualifiait d’inutile. Seule l’écriture lui donnait l’impression de vivre. Elle éprouvait un plaisir certain à déplacer les mots les faisant vibrer au rythme d’un cœur qu’elle avait aussi sensible que les cordes d’un violon. Léa pensait qu’un jour elle pourrait disparaître au bout d’une nuit de chagrin quand les forces s’épuisent et qu’il ne reste plus que ce silence qu’elle entendait sans cesse lui ricaner aux oreilles comme le pire des démons.    


©


Léa est une autre
Recueil de nouvelles par Théa Casamance





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